Mode d’emploi

Déboulonner les préjugés entourant la mode n’est pas chose simple. Comment peut-il en être autrement? D’une part on glorifie le design et glamourise le fashion, d’autre part, aucun code d’éthique n’encadre la plupart des métiers satellite. Se croisent donc dans la même ville une maquilleuse, artiste du pinceau qui sait donner à un regard toute l’intensité d’un individu et une poudreuse qui n’a pour job que de camoufler avec son plumeau la brillance d’un visage. Des agences de mannequins côtoient des agences de pitounes, des kodak kids sans imagination se qualifient de photographes alors que des pros pratiquent l’art de la photo et nous offrent des chefs d’œuvre. Des maisons d’enseignement prodiguent la connaissance dans les règles de l’art, certains collèges, plus mercantiles, vendent des cours comme d’autres commerces distribuent un quelconque produit et forment des designers en série comme les petits pains d’une boulangerie.

Comme tout bon secteur économique qui investit dans des stratégies marketing, les artisans de la mode qui ont accès à ces principes de promo ont une longueur d’avance. Dans certains cas, la renommée va de pair avec les moyens. Cependant, le talent doit être au rendez-vous et un créateur de mode si populaire soit-il a comme mission de « créer » et non pas de s’agiter comme un « cheerleader » de la guenille.
Quand un représentant de la mode au vocabulaire indigent fait l’éloge d’une robe « légerte » ou d’une « belle ensemble de Nouelle » à la télé ou qu’une chroniqueuse de spectacle qui fréquente les salonnards du jet set confond élégance et quétainerie, il devient assez gênant de réclamer nos lettres de noblesse.

En quarante ans de carrière j’ai vu défiler au Québec des associations de créateurs de mode, des maisons d’enseignement spécialisées, des salons de prêt-à-porter, des concours et des galas télévisés célébrant l’industrie de la mode. Des maisons comptables de renom ont scruté  plus d’une fois la santé financière de la mode et prédit avec un dédain à peine voilé la fin éminente du milieu. Ce diagnostic  démontre bien le manque de connaissance et de compréhension de la finance à l’égard de la différence et des arts. Évidemment, au fil des ans une crise anthropologique a succédé à des crises économiques occasionnant des changements de valeurs et d’habitudes de consommation.

Mais le vêtement demeure, présent dans nos vies, nos jobs, nos rencontres. La relation au vêtement est encore un sujet orphelin au Québec et les Québécois ont l’épiderme bien mince concernant les apparences. On confond authenticité et souci de soi, fashion victim et le goût d’être à son meilleur. Pour donner un sens à nos comportements vestimentaires il faut d’abord considérer le vêtement comme un outil important à nos rapports sociaux, affectifs et professionnels et non seulement comme une fantaisie et un caprice de l’égo.
Suivre ou survivre à la mode!

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