Bon nombre d’entreprises ont exploité le filon publicitaire du créateur de mode efféminé soit pour se rehausser en diminuant les designers, soit pour alimenter la rumeur voulant que gay soit synonyme de bon goût. Les personnages de Armand et Albert de la compagnie Reitmans, celui du coiffeur plus gay que gay de Claude Meunier pour Pepsi n’en sont que quelques exemples.
L’INDUSTRIE DE LA GUENILLE OU DE LA GAY-NILLE?
Que dire de cette propriétaire d’agence de mannequins à Montréal qui reprend cette infamie entendue en France : « Les créateurs de mode privilégient les mannequins minces parce qu’ils leur rappellent les corps des jeunes hommes ». Nos créateurs ici n’ont pas le contrôle de l’industrie ni cet esprit tordu.
Le titre de ma chronique s’intitulait initialement « FIF AVE ». Mais la fifure a les temps durs depuis les commentaires concernant le patineur américain aux jeux olympiques et la rafale d’excuses de l’un et de l’autre concernant l’utilisation du terme fif. Le récent livre de Jasmin Roy sur le gay bashing couronne le débat.
Y a-t-il des professions gay et des métiers hétéros; des sports gay et des activités hétéros; des voitures gay et des chars hétéros; un look gay et une allure hétéro? Oui et non, répondrez-vous timidement. Cela dépend…Se prononcer est périlleux. Comment différencier réalité et préjugés?
DÉTAPETTISER LA MODE
Pour « détapettiser » la mode, il faut connaître les rouages de cette industrie. On surestime le pouvoir des designers de mode dans les étapes d’un produit, de la naissance du concept en passant par la production jusqu’à le vente du vêtement en magasin. L’idée persistante que la mode est un diktat imposé par les créateurs est solidement ancrée dans l’opinion publique. En voici un bel exemple :
« J’ai toujours été convaincu que les femmes seraient au désespoir si la Nature les avait faites comme la mode les arrange ! Ce qui m’ébahit, c’est l’ardeur qu’elles mettent malgré tout à la suivre, croyant que la chose les embellit alors que ses diktats sont souvent d’un ridicule consommé. Si, au moins, elles pouvaient prétexter la torture. Même pas ! Vraiment groupies, ces nanas et leurs mémés.
Et voilà qu’on voudrait nous faire le coup à nous aussi. Attention les gars, faudra pas tomber dans le panneau. Non mais, franchement, avez-vous vu ces tenues de gringalets filiformes qu’on voudrait nous faire endosser ? Quel mâle, fier de son état, voudra s’attriquer de la sorte, sinon ces mignons à la mine patibulaire pour faire jouir leur dandy de couturier ?
Et on voudrait nous faire croire que les filles vont craquer pour ça ? Peut-être les échalotes de même cépage qu’eux puisqu’ils font bien la paire. Mais assurément pas celles qui sollicitent autant notre attention que notre concupiscence. » La mode et les gars par André Gareau (M.A.), sexologue. Magazine Aubry & Cie, 2009
Une tendance vestimentaire, comme un texte, doit parfois être extravagante pour qu’on en retienne l’essence. On se fie à l’intelligence du citoyen pour faire la différence entre un prototype et un objet de grande consommation tant en architecture, en design qu’en construction automobile. Les « pitounes » des Salons de l’auto de ce monde sont-elles plus représentatives des chars que le sont les mannequins mâles des looks en devenir?