Conduite vestimentaire

Mon métier d’Analyste en comportements vestimentaires m’amène à observer les gens dans l’ensemble de leurs habitudes et à me pencher sur la tendance qui se dessine chez un individu. Si je compare le rapport qu’une personne entretient avec son alimentation, ses loisirs et la décoration de son habitat, il est possible de trouver le fil conducteur de ses comportements et  de l’appliquer à ses pratiques vestimentaires. L’inverse est aussi possible. Décortiquées, la relation au vêtement et la dynamique vestimentaire d’un individu nous pistent sur son rapport à la vie.
Mon travail consiste à accompagner les femmes et les hommes qui par le biais de leur relation à l’image personnelle, le corps et les looks, complètent un travail de compréhension sur eux-mêmes. Le vêtement est un outil pour s’observer, s’étudier et se révéler. Un rapport sain au vêtement ne laisse aucunement supposer un manque de critique à l’égard de la mode qui à l’instar de plusieurs domaines doit se plier aux lois du marketing pour subsister.
J’utilise dans ma pratique le jeu, le dessin, des grilles sémantiques où les mots sont à l’honneur et des exercices de symbolique. Prenons par exemple votre conduite automobile et  transposons votre comportement sur la route à vos habitudes vestimentaires.

Êtes-vous A) Un conducteur  B) Un pilote de course (même chose en vélo)?
Le pilote de course aspire à être le premier tout comme l’initiateur d’une tendance ou d’un style alors que le conducteur suit le courant dans l’ordre des choses.

Quelle est votre attitude dans la circulation dense? A) Vous suivez la file B) Vous tricotez pour vous faufiler plus rapidement par une ruelle?
A) La circulation dense représente la majorité de la population (au moins 60%). B) En utilisant les ruelles, vous sortez des sentiers connus. Appliqué à votre style, ce comportement peut témoigner de votre singularité.

Votre trajectoire est déviée vers une direction inconnue et mal indiquée de surcroît. A) C’est la panique B) Au contraire, découvrir un autre coin de la région vous enchante?
Votre réaction au changement de route non prévu peut indiquer A) Votre capacité à la nouveauté B) Votre difficulté à négocier le changement en matière de tendance et de mode.

En cherchant un espace de stationnement A) Vous vous glissez dans la première place disponible B) Vous espérez que l’emplacement parfait se présente par magie au risque de vous retrouvez dans un stationnement municipal à quatre fois le prix?
Le stationnement ressemble étrangement au shopping. A) Flairer la bonne affaire et acheter maintenant B) Hésiter en souhaitant trouver mieux ou pis encore angoisser à l’idée de ne rien trouver du tout.

Sceptiques? Vous avez raison, surtout si vous ne conduisez pas! Mon but n’est pas de convaincre les personnalités suspicieuses mais d’amener les gens à réaliser que les vêtements, les tenues et les looks s’inscrivent dans une suite logique des nos comportements.


Maman, qu’est-ce qu’on mange?

Le frigo déborde, le congélateur craque sous la charge des plats « dépanneurs » et le garde-manger est à pleine capacité. Pourtant, le même cri retentit immanquablement du living à 18 heures : « Maman, qu’est-ce qu’on mange? » Ce sont les deux ados de ma sœur, mes velcros chéris qui s’inquiètent du menu. Concentrés sur la planification d’une fête de famille, l’idée de gérer un repas pour cinq nous a échappé, ma sœur et moi. Hum! Voyons voir!
L’humain entretient avec le garde-manger et la garde-robe des rapports très semblables. Pour certains, ils représentent la survie, pour d’autres il s’agit d’un un passage obligé alors que les hédonistes, les sensuels et les épicuriens y voient une façon de s’éclater.
La soupe au chou de ma sœur est mon comfort food. Ma chemise feutrée à capuchon de François Joncas, créateur québécois des années ’90, est mon vêtement fétiche. Les deux me procurent la même sensation de bien-être.
Certaines personnes ne trouvent rien à bouffer dans leur garde-manger; d’autres peuvent cuisiner un repas complet à partir d’une boîte de pois. Certains préparent toujours les mêmes recettes; d’autres innovent selon l’humeur et l’inspiration du jour.
Des gens, par je ne sais quel aveuglement, ne voient que du vide dans leur penderie; d’autres créent des looks avec du fil blanc. Certains frustrent de ne jamais rien trouver qui leur convienne dans les magasins, d’autres glanent avec aisance, de véritables têtes chercheuses.
La notion de lecture  vestimentaire est un concept à peine développé au Québec et l’éducation vestimentaire n’a pas encore gagné ses lettres de noblesse. Il ne faut donc pas s’étonner de l’inconfort ressenti par plusieurs dans l’expérimentation d’un nouveau style.
Voici un truc. Formulez une phrase contenant votre look, votre attitude et enfin le message que vous souhaitez véhiculer. Par exemple, Luce est une professionnelle (look), avec un angle décontracté (attitude) et se veut crédible (message). Marie-Ange est BCBG (look), soignée (attitude) et créatrice (message). Simon est bo-bio (look), convivial (attitude) et pratique (message).
Il ne faut donc pas confondre le look avec l’attitude ou le personnage joué et bien identifier si le message concorde avec le tout. Faire « naturel », être « bien dans sa peau », être « en lien avec ses valeurs », ne sont pas des looks mais bel et bien des ondes qu’on aimerait dégager. Faire « austère », « sobre », « rigide » fait partie des messages transportés par notre apparence. Aussi, évitez de confondre « Je pense que j’ai l’air de… » à « J’ai peur d’avoir l’air de… »